LE PUY DU FOU, UN BASTION IDENTITAIRE AU RELENT ROYALISTE

Le Puy du Fou est un parc à thème sur “l’histoire de France” créé en 1989 par Philippe de Villiers, entrepreneur et fondateur du parti souverainiste Mouvement Pour la France. Un géant avec plus de 163 millions d'euros de chiffre d’affaires en 2023, mais qui ne sert pas seulement l’économie de la région vendéenne et se fait l’écho d’une Histoire alternative.

École française (15e siècle)

Au départ, ce parc situé en Vendée souhaite retracer l’histoire de la Vendée du Moyen Âge jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. De Villiers s’inspire de personnages vendéens comme Jacques-Louis Maupillier, un paysan royaliste ayant combattu durant la Guerre de Vendée qui opposa principalement les Vendéens royalistes à l’armée républicaine. Ce soulèvement paysan va durer de 1793 à 1795 et va faire aux alentours de 200 000 morts.

Ce passé continue d’être narré dans le parc avec le “Dernier Panache”, un spectacle qui relate la vie d’un courageux Vendéen, noble, militaire et proche du peuple, résistant sous la Terreur Républicaine. Son histoire a été adaptée dans le film ‘’Vaincre ou Mourir’’ produit par le Puy du Fou. Ce film a reçu un accueil mitigé du public et tient d’une propagande romancée antirévolutionnaire plus que d'une réalité historique.

Ces deux exemples montrent bien la volonté de Philippe de Villiers de relater une Histoire alternative. Les spectacles servent en effet la réécriture de l’Histoire voulue par l’extrême droite. Elles suivent une chronologie qui ramène les racines de la population française à une civilisation chrétienne qui apparaît dès l’Antiquité.

La quasi-totalité des représentations du Puy du Fou relate une France héroïque et glorieuse, qui se bat contre des envahisseurs romains ou vikings païens que l’on présente comme des pourfendeurs de la chrétienté. L’ensemble peut faire écho à la rhétorique historique révisionniste mise en place par l’extrême droite identitaire, d’une société française millénaire mise en péril par l’envahisseur musulman et dont la menace est le métissage. La fameuse théorie du “Grand Remplacement’’ portée par un proche de De Villiers, Eric Zemmour.

Le parc met en particulier l’accent sur la période médiévale car elle sert un propos important pour l’extrême droite, l’identité chrétienne et conservatrice. Chaque mouvance fasciste puise dans celle-ci des motifs, thèmes et symboles qui “légitiment’’ leur propos ; que ce soit l’islamophobie, le masculinisme ou l'anti républicanisme. La récupération des croisades et des templiers comme symbole est une réponse religieuse et identitaire face à l’islam vu comme l’envahisseur. C’est un exemple parlant de cette appropriation idéologique de l’histoire. 

Il y a dans les cercles d'extrême droite un fantasme pour cette période, car elle ramène à des valeurs traditionnelles chrétiennes, aristocratiques et royalistes. “Avec les spectacles, on est dans une vision idéalisée de la monarchie qui serait vue comme un âge d’or”, explique l’historienne Aurore Chéry. Le parc présente des paysans heureux de travailler sous le regard bienveillant de la noblesse sans montrer toutes les inégalités et les rapports de forces existants à l’époque. 

Les représentations mettent en valeur les puissants qui auraient toujours été du côté du peuple, et cela justifierait aujourd’hui la continuité de ce système monarchique. Il y a aussi dans le parc une prédominance de certaines figures récupérées  par la mouvance identitaire. Pour cela un anneau qui aurait appartenu à Jeanne D’Arc a été acheté par le directeur du Puy du Fou, même si l’authenticité de celui-ci est remise en cause par nombre d’historiens. Pour les vacances de la Toussaint, le parc organise un spectacle avec l'arrivée en carrosse de François Ier et de sa cour pour un banquet fastueux. “Le Puy du Fou célèbre l’enracinement, la France des terroirs, [...] l’art de vivre à la française”’, relate le responsable du site. La monarchie serait alors la racine identitaire de notre pays, une drôle de manière de relater l’histoire de France.

Philippe de Villiers crée son contre roman national qui conserve seulement ce qui est lié au prestige d’une France éternelle, et il n’hésite pas à transformer la vérité historique. Par exemple, il résume la Révolution Française à un événement terrible pour la France et évince toutes les avancées qui ont suivi cette période de l’histoire.

Le Puy du Fou est un reflet flagrant de cette volonté de ressusciter l’Ancien Régime et d'instrumentaliser l'histoire à des fins politiques pour alimenter un récit qui sert à l’extrême droite. Ce discours a une résonance de plus en plus importante à travers les chaînes Bolloré, qui n'hésitent pas à faire venir des historiens qui ont cette vision déterministe de l’Histoire. Le parc vendéen n’est que le fil d’une toile tissée pour servir la bataille culturelle menée par une partie de la droite dure.