SIMONE, LE VOYAGE DU SIÈCLE : UN BIOPIC HALETANT ET TOUCHANT
- Angèle Truchot
- 25 oct. 2022
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 25 oct. 2022
Simone, le voyage du siècle est un drame biographique qui retrace la vie bouleversée et bouleversante de Simone Veil, figure politique majeure du XXe siècle. Disponible dans les salles de cinéma depuis le 12 octobre 2022, ce biopic est réalisé et scénarisé par Olivier Dahan. Il met en scène l’excellente Elsa Zylberstein dans le rôle de Simone Veil.

Le film s’ouvre sur La Ciotat. Simone Veil, interprétée par Elsa Zylberstein et alors âgée, apparaît assise, un carnet sur les genoux. Elle est sur le point de rédiger ses mémoires. Le long-métrage suit la mémoire de Simone Veil, entre flashbacks de son enfance, passant par sa déportation, sa maternité puis enfin sa longue carrière politique.
De la rafle parisienne à Auschwitz, en passant par Drancy et les wagons de bêtes, les flashbacks de la jeune Simone Jacob de 16 ans, interprétée par la talentueuse Rebecca Marder, nous transportent dans l’ambiance angoissante et terrible de l’époque. Séparée de son frère et son père, Simone Jacob est confrontée à l’horreur des camps avec sa sœur, Milou, et sa mère, Yvonne. Malgré le combat constant que se révèle être la vie dans les baraquements, rationnées de nourriture et exposées aux maladies comme aux rats, elle y rencontre des jeunes femmes avec qui elle garde des liens toute sa vie : c’est notamment le cas de Marceline Rozenberg.
ENTRE AMBITION PROFESSIONNELLE ET SOUVENIR DOULOUREUX DES CAMPS
Inspirée par la trajectoire de sa défunte mère, Simone Veil est encouragée par sa sœur à faire des études. Elle étudie sur les bancs de Sciences Po Paris aux côtés d’un certain Antoine Veil, son futur mari. Elle a avec lui trois fils et est contrainte d’arrêter ses études - elle rêve d’être avocate - pour le suivre dans sa carrière grandissante d’attaché-parlementaire. Lorsqu’elle retourne sur les bancs de la faculté, ce n’est plus avec l’ambition d’être avocate, changement d’avis impulsé par son mari, mais pour tenter le Concours de la magistrature, qu’elle obtient en 1956.
Si le chemin est rempli d’embûches, Simone Veil révolutionne pourtant, par son statut de haute fonctionnaire-magistrate, l’administration pénitentiaire française. Résolument déterminée à abolir toutes formes d’injustices, elle exige très vite des centres pénitentiaires français un meilleur traitement des prisonniers et surtout, des prisonnières. C’est dans ce contexte et celui de la guerre d’Algérie qu’elle y est envoyée par le ministre de la Justice, Edmond Michelet. Elle se bat alors, dès son retour, pour le transfert en France de prisonnières algériennes maltraitées et agressées sexuellement dans les prisons d’Algérie. Les scènes du film sont particulièrement réalistes et choquantes, nous plongeant dans l’atmosphère de l’époque.

UN ENGAGEMENT POLITIQUE MARQUÉ PAR L'HUMANISME ET LA JUSTICE
Animée par des valeurs profondément humanistes et féministes, Simone Veil est nommée ministre de la Santé sous le gouvernement Chirac de Valéry Giscard d’Estaing. C’est le 20 décembre 1974 qu’elle fait voter, à l’Assemblée nationale, le texte de loi qu’elle défend, qui légalise le recours à l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Ce vote n’a pourtant pas été chose facile : il fait l’objet de débats houleux à l’Assemblée nationale, une femme devant affronter des députés à forte majorité masculine. Ces derniers n’hésitaient pas à l’interrompre pendant ses discours, la rappelant à sa condition de femme ou usant d’un vocabulaire antisémite la ramenant également à son passé de rescapée des camps de concentration.
Après avoir traversé ces obstacles, elle se présente aux élections européennes de 1979, fervente défenseuse de l’Europe. Ainsi, elle a dû faire face, de nouveau, à de nombreux récalcitrants, dont les militants du FN. Ce à quoi elle répond le 8 juin 1979 des mots restés mythiques : “Vous ne me faites pas peur. Pas peur du tout ! J’ai survécu à bien pire que vous ! Vous n’êtes que des SS au petit pied.” Ce discours, interprété par Elsa Zylberstein, est fidèle à la réalité. En effet, ce discours était retransmis en direct au journal télévisé, et l’archive est encore disponible de nos jours (site de l’INA). Son élection comme première présidente du Parlement européen élue au suffrage universel consacre ses engagements. Cette consécration lui permet de rencontrer une femme qui, avant elle, luttait pour le même combat : Louise Weiss. Suffragette, politicienne féministe et femme de lettres, Louise Weiss inspire Simone Veil tout au long de sa vie, héritage de sa propre mère.
“Vous ne me faites pas peur. Pas peur du tout ! J’ai survécu à bien pire que vous !” - Simone Veil, le 8 juin 1979
Femme, mère, politicienne, européenne, féministe sont tant de mots auxquels Simone, le voyage du siècle nous ramène pour qualifier la figure exceptionnelle qu’est Simone Veil. Le jeu des actrices et acteurs, dont celles interprétant Simone Veil jeune et âgée, est particulièrement touchant. C’est un film bouleversant qui, à la fin de la séance, n’a laissé aucun spectateur ni aucune spectatrice indemne.
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